La crise sanitaire et économique sans précédent que la France traverse actuellement impacte fortement la vie quotidienne des personnes en situation de handicap et leur famille : isolement et précarité accrus, ruptures de soins et aggravation des problèmes de santé, épuisement des aidantes et aidants, etc. Et le nouveau confinement fait craindre une nouvelle aggravation de leur situation.
Dans ce contexte, ce Comité interministériel du handicap était très attendu par les personnes et les associations qui les représentent.
Avec une nouvelle méthodologie de travail mise en place, le Premier ministre a fait part d’une volonté réelle et sérieuse d’avancer concrètement et rapidement sur un certain nombre de sujets, en affichant ses ambitions et en donnant rendez-vous pour un nouveau Comité interministériel du handicap dans six mois.
Les mesures présentées lors du Comité interministériel du handicap vont dans le bon sens :
- ouverture d’un droit à réexamen pour un accès aux masters,
- mise en place d’un Comité national de suivi de l’enseignement supérieur inclusif,
- déploiement de plateformes de répit sur tout le territoire,
- extension du délai pour l’aide à l’embauche des travailleurs en situation de handicap,
- habitat inclusif…
Pour autant, la crise a révélé les limites de la vie à domicile et de l’accessibilité ainsi que la précarité de nombreuses personnes en situation de handicap. Sur ce dernier point, un grand nombre d’entre elles n’ont pas été bénéficiaires de la prime de solidarité et beaucoup voient leur niveau de ressources qui reste en deçà du seuil de pauvreté.
C’est pourquoi APF France handicap pointe plusieurs attentes encore non satisfaites des personnes qu’elle représente :
- L’accessibilité du cadre bâti et des transports : la France encore en retard
APF France handicap salue les engagements pris en matière d’accessibilité numérique et de communication. Toutefois, elle rappelle le retard considérable pris en matière d’accessibilité du cadre bâti et des transports et demande une concrétisation des engagements pris à l’approche de l’échéance du dispositif 2024 des Ad’AP (Agendas d’Accessibilité Programmée).
- L’accès à l’emploi dégradé par la crise sanitaire et économique : des avancées encore insuffisantes
APF France handicap salue la prolongation au 30 juin des aides à l’embauche mises en oeuvre dans le cadre du plan de relance.
Néanmoins, l’association rappelle que le taux de chômage des personnes en situation de handicap reste deux fois plus élevé que celui de l’ensemble de la population et que les inquiétudes restent fortes sur l’accompagnement spécifique des publics fragiles, notamment les jeunes, dans cette période de crise (1).
- La Compensation du handicap : un droit qui reste à renforcer
APF France handicap note avec satisfaction l’engagement du Premier ministre pour que la loi annoncée pour 2021 soit une “loi Autonomie” qui prenne en compte à la fois les personnes âgées et les personnes en situation de handicap.
Elle relève néanmoins que lors de la dernière Conférence nationale du handicap (CNH), Emmanuel Macron annonçait vouloir élargir l’aide humaine et les aides techniques nécessaires aux parents en situation de handicap, au titre de la prestation de compensation du handicap (PCH), pour les familles dont les enfants sont âgés de 0 à 7 ans et ce, dès le 1er janvier 2021. Cela sera bien effectif mais sous une forme forfaitaire “transitoire” qui va fortement limiter ce droit et générer des perdants. APF France handicap souligne avec force que cette approche forfaitaire est contraire au principe d’individualisation de la prestation de compensation qui aurait permis à chaque parent en situation de handicap, selon ses besoins et sa situation, d’avoir une prestation adaptée.
Enfin, le droit à compensation doit encore être renforcé sur de très nombreux points.
- L’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH) intégrée à la branche autonomie : une prestation en danger
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, en discussion au Parlement, prévoit de retirer l’AEEH de la branche famille et de la transférer intégralement dans la nouvelle branche autonomie en cours de création. Le CIH n’est pas revenu sur cette décision et APF France handicap le regrette vivement.
En effet, l’AEEH ne vient pas seulement compenser le handicap de l’enfant, elle vient aussi acter la prise en compte de la situation particulière que représente le fait d’élever un enfant handicapé (2).
- Revalorisation des rémunérations des professionnels de santé dans le secteur médico-social (handicap) : pour une égalité de traitement
APF France handicap remercie le Premier ministre pour s’être emparé de ce sujet mais demande que la mission confiée ce matin à Michel Laforcade (ancien directeur général de l’ARS de Nouvelle-Aquitaine) soit menée rapidement. En effet, il est incompréhensible et inacceptable que ces professionnels n’aient pas la même égalité de traitement que ceux du secteur sanitaire et des EHPAD.
APF France handicap prend donc acte des engagements et de la méthode proposés par le Premier ministre et son gouvernement qui suppose un dialogue fort.
Les mesures annoncées doivent maintenant être concrétisées rapidement : APF France handicap rappelle que de nombreuses personnes en situation de handicap vivent dans une situation de précarité et d’isolement que la crise aggrave. Il y a urgence pour que l’ensemble des réponses appropriées leur soient apportées.
(1) Webinaire “Jeunes en situation de handicap et emploi : une génération doublement sacrifiée ?” : mardi 17 novembre à 16h.
(2) Une étude de novembre 2020 de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques) révèle que les ménages bénéficiaires de l’AEEH vivent sous le seuil de pauvreté dans 24 % des cas, contre 17 % pour les autres ménages avec enfants.